Approfondissement

Parmi les raisons qui militent en faveur de l'utilisation de l'apprentissage par problèmes, il y a le fait que l'APP peut s'inscrire dans une conception de l'apprentissage selon une perspective socioconstructiviste.

Synthèse d'une conception de l'apprentissage dans une perspective socioconstructiviste

L'apprentissage se fait à partir des propres structures de pensée de l'apprenant. Celui-ci construit lui-même graduellement ses connaissances.

La connaissance nouvelle n'est pas seulement un élément supplémentaire qui vient se juxtaposer à l'acquis antérieur mais plutôt l'occasion d'une réorganisation, d'une restructuration des anciennes connaissances en un tout renouvelé qui puisse englober l'élément neuf et demeurer cohérent.

L'apprenant possède des conceptions préalables ou initiales à travers lesquelles il interprète les nouvelles informations. Ces conceptions préalables forment sa grille de lecture et de compréhension du réel. Elles peuvent parfois faire obstacle aux notions enseignées. L'apprentissage d'un savoir dépend donc des conceptions préalables. Il faut utiliser des méthodes pédagogiques qui s'appuient sur les conceptions préalables des apprenants sinon les connaissances dont on vise l'acquisition risquent d'être rapidement oubliées.

Lorsque ces conceptions ne sont pas en opposition avec le savoir « officiel », elles peuvent évoluer par l'utilisation d'analogie ou par l'apport d'informations complémentaires.

Lorsqu'il y a conflit entre les nouvelles informations et les conceptions existantes, il se produit une dissonance ou un déséquilibre cognitif. S'il n'est pas rejeté par l'apprenant, la prise de conscience d'un conflit cognitif peut forcer l'adaptation, la restructuration des connaissances acquises, processus que l'on nomme accommodation.

La prise de conscience d'un conflit peut être amenée ou accélérée par un agent extérieur, la confrontation des points de vue au sein d'un groupe par exemple. Dans ce dernier cas, on parle alors de conflit sociocognitif. Selon Bertrand, celui-ci serait particulièrement utile pour les raisons suivantes :

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il permet à l'apprenant de prendre conscience de réponses autres que la sienne et de la diversité des points de vue ; cela l'amène à se décentrer par rapport à sa position initiale ;

l'apprenant découvre dans les réponses des autres des informations (intéressantes, rassurantes, fausses, peu importe) qui lui seront utiles dans la construction de sa connaissance ;

il augmente la probabilité que l'apprenant soit actif cognitivement puisqu'il y a une certaine nécessité de régulation sociale, d'une coordination dans les actions exigées par une situation donnée ;

il peut amener l'apprenant à accepter d'être en situation de changement et de coopérer pour la résolution de problèmes. 

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Adapté de: Bertrand, Y. (1998). Théories contemporaines de l'éducation. Montréal : Éditions nouvelles, p. 143.

Des principes qui incitent à utiliser une approche par problèmes comme l'APP

Les principes suivants s'inscrivent dans une perspective socioconstructiviste de l'apprentissage. Selon cette perspective, ils sont à privilégier dans le choix et la mise en oeuvre de toute activité d'apprentissage.

C'est le processus qui est important, «ce qui se passe dans la tête de l'étudiant». Ainsi, c'est le processus de réflexion des étudiants qui est le «moteur» du déroulement de l'activité. Le feedback de l'enseignant sert à guider les étudiants et concerne davantage le processus.

L'activité part d'une situation réellement problématique et signifiante pour l'étudiant, c'est-à-dire une situation de doute, d'incertitude ou de difficulté pour celui-ci, et l'amène à porter un jugement ou à trouver une solution en exerçant sa pensée critique. On recherche une situation pour laquelle il peut exister plus d'une solution et pour laquelle il n'y a pas qu'une seule façon de procéder.

L'enseignant soutient, guide et, au besoin, oriente la réflexion personnelle des étudiants par des questions ou des remarques judicieuses.

Le processus encourage l'autonomie, l'initiative et le leadership chez les étudiants.

La coopération entre les étudiants au sein du groupe est fondamentale :

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le groupe forme une communauté de recherche, un groupe social au sein duquel on apprend à considérer des vues opposées, à développer une argumentation, à délibérer et à porter un jugement critique ;

elle permet de développer la capacité à verbaliser ainsi que la capacité à écouter ;

l'aide apportée par les pairs, tant en ce qui concerne les connaissances, les stratégies cognitives que le soutien affectif, contribue à l'accomplissement d'une tâche qu'il aurait été impossible pour l'étudiant de réaliser seul ;

le processus de réflexion du groupe est progressivement intériorisé par l'étudiant.

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Le dialogue entre l'étudiant et l'enseignant de même qu'entre l'étudiant et ses pairs est très important. L'enseignant doit encourager les étudiants à se poser mutuellement des questions ouvertes, fécondes et réfléchies et à s'écouter.

Le développement des différentes habiletés liées à la capacité de réflexion critique est progressif. Il faut donner l'occasion de les exercer très souvent.

L'erreur est une étape normale au cours de la réflexion conduisant à la résolution d'une situation problématique. La réflexion se réoriente jusqu'à ce qu'elle atteigne son but.

L'enseignant doit être vigilant afin que l'étudiant ne reste pas avec un sentiment d'échec. Il doit lui faire prendre conscience des apprentissages effectués.

Le bilan des apprentissages est l'étape cruciale de l'activité : on évalue ensemble la démarche et on fait un bilan de ce que l'on retire de cette expérience. On amène également les étudiants à prendre conscience de leurs valeurs, de leurs attitudes et de leurs émotions.